L'histoire
belge de l'empire Cockerill débute en 1797 lorsque William Cockerill,
un constructeur de machines textiles originaire d'Angleterre, se rendit
à Verviers pour conclure un contrat avec les filatures locales. La
venue de William dans la région contribuera durant des décennies à
l'essor industriel de la région. En 1807, à la fin de son contrat avec
les filatures, il décide de s'implanter à Liège pour fonder un atelier
de construction de machines à tisser. Le succès de cette entreprise fut
exponentiel mais l'industriel décide de se retirer des affaires en
1813, laissant la succession à ses fils John et Charles-James. William
meurt à Aix-la-Chapelle en 1837. Forts d'une expérience concrète dans
la construction des machines à vapeur, les deux frères décident de se
tourner vers la sidérurgie avant d'acquérir l'ancienne résidence des
Princes-Evêques de Liège située à Seraing où ils décidèrent d'y établir
le siège de leur entreprise. En 1821, alors que les Cockerill dirigent
déjà une fabrique de fer et de nombreux ateliers mécaniques, ils se
lancent dans la construction d'un haut fourneau à coke. En 1923
cependant, Charles-James se retire et cède ses parts à John qui
devient, à 33ans, le seul propriétaire des usines.
Dans le but d'alimenter ses fournaises, celui-ci rachète en 1828 la concession minière
Henri-Guillaume,
se trouvant à proximité immédiate de ses installations. D'une
superficie de 195 hectares, cette zone d'exploitation comprend trois
puits fonctionnels :
- Henri-Guillaume,
- Grand Colard,
- Petit Colard.
Deux
ans plus tard, John s'associe avec d'autres industriels de la région
pour exploiter le charbon sous Sclessin. Accordée sous un contrat
d'association en 1830, cette nouvelle concession donnera naissance à la
Société Anonyme du Charbonnage de Sclessin en 1835. Dans la foulée,
Cockerill fit construire un port avant d'étendre ses activités au
laminage et à la construction ferroviaire. Le premier modèle de
locomotive sortira de ses ateliers en 1835 mais quatre ans plus tard,
la crise financière fragilise ses industries et John est contraint de
se mettre en liquidation. À la recherche de soutiens financiers,
celui-ci part en Russie mais, arrivé à Varsovie, il tombe gravement
malade et meurt, le 19 juin 1840, de la fièvre typhoïde. Il avait
50ans. Sans enfants, ses usines allèrent à une poignée d'héritiers qui
décidèrent, en 1842, de rassembler son empire au sein de la Société Anonyme John
Cockerill
dont la direction fut déléguée à Gustave Pastor, neveu de John. Composé
de Houillères, de hauts-fourneaux, de laminoirs, de forges et fonderies
ou encore d'ateliers oeuvrants à la fabrication de machines à vapeur,
de chaudières, de ponts, de locomotives, de rails ou encore de navires,
cet ensemble constitue le plus vaste regroupement industriel du monde
et
concourt à faire de la Belgique la deuxième puissance économique
mondiale, juste derrière le Royaume-Uni.
Les chiffres de
production donnent le tournis et, outre la consommation annuelle de
118 millions de tonnes de charbon, l'entreprise a produit en 1850 près
de 13 millions de kilos de fer, 50 locomotives, 12 machines de terre, 4
paires de machines pour bateaux et une machine destinée à la navigation
transatlantique. En 1878, Cockerill absorba une partie équivalente à
40% de la concession du charbonnage de l'Espérance dont le dernier
siège actif est le charbonnage de Morchamps. Quant au siège Henri
Guillaume, il fermera ses portes en 1883 avant d'être remplacé par deux
autres fosses chargées d'exploiter le nord de la concession : les puits
Marie et Caroline.
À la fin du 19ème
siècle, la société sera sectionnée en plusieurs
divisions :
- La Division
Houillère,
- La Division
Minière,
- La Division
Fonderie,
- La Division
Fabrique de Fer,
- La Division
Ateliers de Constructions.
Par
la suite, la société investira massivement dans les concessions
minières du Luxembourg et dans la récupération des gaz de hauts
fourneaux. Elle participa également à l'établissement de la Société
Anonyme des Liégeois en Campine dont le siège de Zwartberg deviendra le
charbonnage le plus moderne du bassin campinois.
Durant la
première guerre mondiale, l'ensemble des installations de la société
sont démantelées et expédiées en Allemagne. Le directeur Adoplhe
Greiner sera arrêté au début du conflit avant de mourir un an plus
tard. Il sera remplacé par son fils Leon mais celui-ci sera déporté en
1917. À la suite de la guerre, l'entreprise est ruinée et il lui faudra
attendre près de 10ans pour revenir à son niveau optimal. En 1930,
alors que la crise économique fait des ravages, Cockerill réussi à
stabiliser ses finances grâce à sa fusion avec le charbonnage des
Liégeois, ce siège permit également à la société de maintenir sa
production de charbon après la fermeture des puits Caroline et Marie,
respectivement en 1939 et 1940. Lors du second conflit mondial, les
installations sont réquisitionnées mais restent en état de marche,
participant ainsi à la reconstruction du pays après la libération.
Continuant son expansion, la société fusionnera en 1945 avec la Société
Anonyme d'Angleur-Athus, alors en faillite et toujours propriétaire de
la Société Anonyme des Charbonnages de l'Agrappe-Escouffiaux et Hornu
et Wasmes, dans le Borinage.
En 1955, Cockerill
fusionnera avec la Société Anonyme d'ougrée-Marihaye, une société née
en 1900 des suites du rapprochement entre la Société Anonyme des
Charbonnages de Marihaye et la Société Anonyme
des Charbonnages et Hauts Fourneaux d'Ougrée. Avec ses 45.000 ouvriers
et sa production de deux millions de tonnes d'acier par an, la nouvelle
Société Anonyme de
Cockerill-Ougrée,
est désormais le leader incontesté de la production d'acier en
Belgique. En 1962, Cockerill-Ougrée s'associa avec les sociétés ARBED
et Schenider pour constituer le Syndicat International d’Études
Sidérurgiques Maritimes (SIDMAR), l'objectif étant de constituer une
usine côtière dans la périphérie de Gand. Dotée d'installations
sidérurgiques complètes, cet ensemble sera inauguré deux ans plus tard.
En
1966, la société fusionnera avec les Forges de la Providence, une
société carolorégienne née en 1838 sous l'égide des Bonehill et
possédant depuis deux sites de production en France. Le groupe changea
encore de nom pour devenir la Société
Anonyme de Cockerill-Ougrée-Providence.
Quatre ans plus tard, celle-ci fit l'acquisition de la Société
Métallurgique d'Espérance-Longdoz, un groupe possédant plusieurs
houillères et hauts fourneaux ainsi qu'une immense aciérie située à
Chertal. Devenue la Société
Anonyme Cockerill-Ougrée-Providence et Esperance-Longdoz,
celle-ci prit par la suite le nom plus court et tout aussi marquant de
"Cockerill". Sept millions de tonnes d'aciers sortent alors de ses
installations pour un effectif de 65.000 personnes. En 1969, Cockerill
achève ses fusions liégeoises en absorbant sa dernière société
concurrente : Phenix Works. Dans les années soixante, la sidérurgie
belge sera mis à mal par le choc pétrolier, obligeant la Région
Wallonne à investir massivement dans les sociétés Carlam, Hainaut
Sambre
et Cockerill, cet évènement provoquant, en 1981, la fusion entre ces
deux derniers. Cockerill-Sambre
était né. Cependant, l'arrivée sur le marché des pays émergents
entraîne une grave crise au sein de la société qui souffre également de
la surproduction sidérurgique européenne. Obligée de se séparer de la
moitié de ses effectifs, celle-ci décida de moderniser ses usines les
plus rentables pour se maintenir à flot. Ces travaux ont cependant un
coût et Cockerill-Sambre est obligé de faire appel à un repreneur.
Thyssen et Usinor
se montrent intéressés mais c'est ce dernier qui l'emporta, suite à
l'abandon de son concurrent, en 1998.
En 2001, le regroupement des sociétés ARBED, Aceralia et Usinor donnera
naissance à Arcelor.
Cependant, dans les années qui suivirent, le groupe décida de fermer
progressivement la phase à chaud liégeoise. En 2006, l'arrivée de
Mittal Steel donne un sursaut d'espoir aux sites liés à Arcelor mais
l'avènement d'ArcelorMittal
sonna définitivement le glas de la ligne à chaud liégeoise qui
s'éteignit définitivement le 12 octobre 2011.
En 2019, ArclorMittal dut se séparer de ses lignes de galvanisation 4 et 5 de
Flémalle ains que de l'usine Ferbatil
au profit de la société Liberty Group, appartenant au milliardaire
indienSanjeev Gupta mais possède toujours de grandes installations
fonctionnelles telles que SIDMAR ou encore les Kessales.
Je remercie Xavier pour ses photos de l'ancienne agglomération d'Ougrée.