La
présence de minerai de fer en Lorraine permit très tôt le développement
d'une activité sidérurgique dans la région d'Hayange. En effet, les
premières traces de métallurgie retrouvées datent de l'antiquité, le
minerais étant alors très probablement extrait dans les affleurements
présents dans les environs de Florhenges. Au fil des siècles, cette
industrie prit de l'ampleur et c'est entre le 12ème et le 15ème siècle
que les premières forges hydrauliques d'importance apparaissent en
bordure de la Fensch.
Plusieurs forges se distinguent alors :
- la forge de Suzange,
- la forge de la Rodolphe,
- la forge de la Marolles,
- la forge de Moyeuvre,
- la forge de Mauway-Moulin.
Cependant,
malgré des débuts prometteurs, c'est véritablement au début du 16ème
siècle que la sidérurgie Locale commença à prendre de l'importance.
C'est à cette époque, en 1704, que Jean-Martin de Wendel arrive dans la
région et décide d'acquérir les forges de la Rodolphe et de la Marolle,
alors sur le déclin. C'est ainsi que ce dernier devient le premier
maître de forges de la dynastie de Wendel qui allait devenir avec les
années, l'une des familles d'industriels les plus influentes d'Europe.
Au cours du 18ème siècle, Jean Charles de Wendel, fils de Jean-Martin,
épouse Marguerite d'Hausen et fonde, en 1754, les forges de
Hombourg-Haut ainsi que les forges et hauts fourneaux de l'Hôpital, en
1760. Progressivement, le minerais lorrain commence à être extrait en
profondeur via des mines à flanc de coteaux et des puits. Les
recherches géologiques menées dans le bassin mènent à la découverte de
neuf couches de minerais distinctes divisées en deux catégories, toutes
deux formées durant le Jurassique Moyen, entre le Toarcien et
l'Aalénien :
- Zone calcaire :
- la rouge supérieure,
- la rouge moyenne,
- la rouge principale,
- la jaune sauvage,
- la jaune principale,
- la grise.
- Zone silicieuse :
- la brune,
- la noire,
- la verte.
Le
gisement est composé de minette, un minerai possédant une teneur en fer
comprise entre 28 et 34 % ainsi qu'une teneur en phosphore comprise
entre 0,5 et 1%. Étalé sur près de 40 kilomètres et possédant une
réserve estimée à six milliards de tonnes de minerai, le gisement
Lorrain est rapidement considéré comme l'un des principaux centre
d'exploitation au monde. L'industrialisation de la Lorraine s'accentue
considérablement au cours du 18ème siècle mais, lors de la révolution
française, les différentes entreprises liées à la famille de Wendel
sont saisies et revendues à un certain Louis Gandthil qui finit par
perdre ses nouvelles possessions au bénéfice de l'État qui remettra les
forges en vente en 1803. C'est finalement François de Wendel qui
racheta l'ensemble des installations avant de les moderniser grâce
notamment à l'arrivée des premières machines à vapeur ainsi qu'à
l'extension du réseau ferroviaire. Les de Wendel sont désormais
omniprésents dans la région mais la guerre franco-allemande de 1870 se
termine par l'annexion d'une grande partie de la Lorraine et Hayange se
retrouve intégré à l'Empire allemand. Une grande partie de la famille
de Wendel, refusant de devenir allemande, se réfugia à Jœuf, une
localité située en Lorraine française, avant de fonder une nouvelle
usine, aujourd'hui détruite. Deux fils de Charles de Wendel restèrent
cependant à Hayange et furent par la suite élus au Reichstag suite au
vote d'une population restée fidèle à la France. En 1871 est créée la Société des Petits-fils de
François de Wendel et Cie (transformée en Société de Wendel et Cie
en 1880), une société tentaculaire qui permit aux de Wendel d'investir
dans d'autres contrées, principalement dans la Ruhr ainsi que dans les
houillères de Stiring qui allaient devenir la principale source de
charbon de Lorraine. C'est au lendemain de la première guerre mondiale
que la Lorraine redevient intégralement française et que les usines
sidérurgiques situées de part et d'autre de l'ancienne frontière furent
toutes réunifiées dans le groupe
de Wendel
qui atteint alors son apogée. François de Wendel devient député puis
sénateur et est élu président du Comité des forges avant de devenir
régent de la Banque de France. Considéré désormais comme l'un des
principaux acteurs de la vie politique française, il s'abstiendra de
voter pour les pleins pouvoirs du maréchal Pétain en 1940. Cependant,
l'entrée en guerre de la France mène une fois de plus à la confiscation
des installations sidérurgiques et minières de la famille. Une fois la
paix revenue, les industries de Wendel échappent à la nationalisation,
les plans Monnet et Marshall favorisant leur expansion et leur
modernisation. La reconstitution du secteur sidérurgique mène à la
fusion de plusieurs entreprises qui furent réunies au sein de la Société Lorraine de
Laminage Continu (SOLLAC). Après la mort de François,
Humbert, Maurice et Henri de Wendel, la société, devenue en 1964 la Société des Aciéries et
Laminoirs de Lorraine
(SACILOR), passe entre les mains de l'État avant d'être nationalisée en
1981. Avec le temps, l'usine sidérurgique des de Wendel est devenue
titanesque.
Durant les années 80, cette dernière est composée comme suit :
- deux cokeries (Serémange-Erzange et Florange),
- six hauts fourneaux :
- quatre à Patural,
- deux à Joeuf.
- deux agglomérations (Suzange et Fontoy),
- une aciérie (Serémange),
- un laminoir à chaud (Serémange)
- deux laminoirs à froid (Ébange et Florange)
Cependant,
après la fermeture des mines de fer, la sidérurgie lorraine ne
représente plus que 40% de la production nationale d'acier. En quelques
années, elle a connu près de 41.000 suppressions d'emplois dont 20.000
en 1977, ce désastre étant accompagné d'une dette de 38 milliards de
francs français. En 1986, Sacilor fusionne avec son concurrent Usinor
pour former le groupe Usinor-Sacilor.
Cette nouvelle structure ne parvient hélas pas à redresser la situation
et en l'espace de quelques années, le complexe sidérurgique est obligé
de se séparer d'une grande partie de ses installations. À l'aube du
21ème siècle, il ne reste que deux hauts fourneaux en activité (Patural
3 et Patural 6). En 2002, Usinor fusionne avec Aceralia et Arbed pour
former le groupe
Arcelor, une superstructure rachetée en 2006 par Mittal
Steel Company pour finalement former le groupe ArcelorMittal.
Les hauts fourneaux de Patural sont mis sous cocon en 2011 et
définitivement arrêtés en décembre 2018. En 2021, il ne reste du
complexe que les trois laminoirs, la cokerie de Florange ayant été
fermée en 2020. Aujourd'hui, la maison de Wendel est devenue une
société d'investissement et détient des parts dans diverses sociétés
internationales. Le groupe ArcelorMittal est quant à lui devenu le plus
grand fournisseur d'acier au monde avec une production estimée à près
de cent millions de tonnes d'acier par an.