Au
cours de son histoire industrielle, la sidérurgie wallonne connu une
période d'autarcie tant au niveau houiller qu'au niveau minéral. Deux
types d'exploitations se distinguent rapidement : Les mines situées sur
une concession accordée par l'Etat et les minières, de petites
exploitations qu'on pourrait qualifier de plus "artisanales". Ces
dernières furent étonnamment nombreuses dans la région Thudinienne
ainsi que sur les bords de Meuse , entre Namur et Liège où 63 communes
abritèrent de petites exploitation ferreuses. Outre ce minerai,
différentes recherches permirent de mettre la main sur des filons de
charbon, de calamine, de plomb ainsi que de pyrite et de blende.
Si
ces filons ne furent jamais assez abondants pour entretenir une
extraction régulière, leur existence permit néanmoins d'entretenir un
espoir de richesse, nottamment à Couthuin où l'activité minière fut
particulièrement florissante. En septembre 1830, les différentes
minières de la commune furent réunies en deux concessions distinctes,
toutes deux accordées par le gouvernement hollandais :
- La concession des Propriétaires de Surface,
- la concession des Maîtres de forges.
L'octroi
de ces concessions imposait en outre d'exploiter les ressources de
manière intensives ainsi que d'effectuer les travaux nécessaires à la
réalisation de ce but comme la réalisation de galeries d'aérage et
d'exhaure permettant l'approfondissement des travaux au-delà du niveau
de la Meuse. La récession qui suivit l'indépendance fut néanmoins un
motif valable pour obtenir une dérogation à l'application des
différentes clauses et, dès 1834, la reprise de l'activité industrielle
permit une intensification de l'extraction du fer, tant au niveau des
concessions qu'au niveau de nouvelles minières non accordées par
l'Etat. En 1835, soupçonnant la création d'un nouveau complexe
sidérurgique à Liège, Mr de Mélotte, alors propriétaire de la
concession des Propriétaires de Surface, contacta à titre personnel Mr
Elias, directeur de la Société Anonyme du Charbonnage de Sclessin
afin de le convaincre d'investir dans le bassin hutois. Désireux de
favoriser l'exploitation indigène, Mr Elias se lança dans une vaste
phase de prospection à Couthuin mais la crise de 1839 se répercuta sur
cette dernière et sur les 22 fosses ouvertes par la société de
Sclessin, seulement deux sont encore actives en 1840, le nombre de
mineurs passant quant à lui de 300 à 50. La concession des Maîtres de
forges fut moins touchées par la crise et possédait encore sept fosses
en 1848. Cependant, d'importantes venues d'eaux finissent par avoir
raison des différents travaux et vers la moitié du 19ème siècle,
l'intégralité de cette concession est à l'arrêt. En 1857, de nouvelles
recherches réalisées dans la zone aboutirent à la création d'une
nouvelle concession tournée exclusivement vers la pyrite de fer. Dans
le but de favoriser l'exportation du minerai par voie fluviale,
Sclessin décide d'investir dans le creusement d'une voie de transport
souterraine d'environ sept kilomètres aboutissant à Bas-Oha, au lieu
dit "Java". Cet ouvrage donnant accès à de nouveaux champs
d'exploitation, l'ensemble des minières de Couthuin ferma peu de temps
avant la fin du 19ème siècle. La nouvelle exploitation, réalisée par de
petites tailles chassantes, assure alors une extraction quotidienne de
108 tonnes de minerai de fer. L'extraction des autres métaux de la
concession n'arrive hélas pas à répondre aux exigences de rentabilité
imposées par la société et leur exploitation est peu à peu arrêtée.
Voici le cumul annuel de ces filons lors de leur dernière année
d'abattage :
- calamine : 30 tonnes,
- blende : 25 tonnes,
- pyrite : 14 tonnes.
Le
plomb connu en revanche un essor plus important. Son extraction passa
de 270 tonnes en 1884 à 515 tonnes en 1886, ce qui représente 40% de la
production nationale. Hélas, le filon s'épuisa rapidement et son
exploitation cessa définitivement en 1890. L'activité des mines de fer
du pays n'arrivant plus à répondre à la demande du marché, la Société Anonyme des Hauts Fourneaux, Mines et Charbonnages de Sclessin
se tourne vers les gisements ferreux du Grand-duché de Luxembourg.
Ainsi, le minerai hutois utilisé dans les hauts fourneaux de Sclessin
sont progressivement mélangés aux produits des mines de Rodange et de
la Madeleine. La mise à feu d'un nouveau haut fourneau à Angleur imposa
de nouvelles contraintes à la société qui augmenta ses importations au
détriment du fer de Couthuin, pourtant jugé indispensable de part sa
faible teneur en silice. Reprise par la Société Anonyme des Aciéries d'Angleur,
la société tenta d'absorber les concessions voisines de Couthuin mais
les négociations menées avec les propriétaires de celles-ci
n'aboutirent pas et, en mars 1897, l'exploitation des mines de fer de
Couthuin fut interrompue. L'activité minière de la commune fut mise à
l'arrêt pendant près de quinze ans mais, en 1911, la Société des Charbonnages Réunis Andenelle-Hautebise-Les Liégeois
rachète la concession de Couthuin pour 225.000 francs belge aux
Aciéries d'Angleur, le but étant de créer à Couthuin une exploitation
de charbon maigre stable.
Le premier conflit mondial provoque
cependant l'abandon de l'exploitation qui reprend de plus belle en août
1918 avant de stopper à nouveau en 1924 suite au manque de rentabilité.
Le groupe Henrotte-Fassin
décide alors d'investir dans le charbonnage et dans la réaffectation de
la galerie de Java mais sans résultat et c'est en 1925 que la mine
ferme à nouveau. Après la seconde guerre mondiale, les installations de
la galerie de Java furent cédées à une SPRL constituée en 1946 pour la
mise en valeur des ressources charbonnières de Couthuin mais le
résultat se solda à nouveau par un échec. La concession fut par la
suite reprise par la Société Anonyme de Cockerill-Ougrée-Providence
afin de réaliser une nouvelle étude de faisabilité sur l'exploitation à
grande échelle du fer dans la région mais, même si les ressources sont
visiblement encore très abondantes, les frais liés à l'extraction de
ces dernières sont malheureusement trop conséquents pour y établir un
siège rentable. Aujourd'hui, il reste très peu de vestige de l'histoire
industrielle de Couthuin. Au lieu-dit "Le Fond de Jottée", on retrouve
quelques bornes de puits non marquées accompagnées de haldes mais plus
aucune trace de bâtiment. La galerie de Java existe toujours mais est
fermée par une lourde grille. D'après Vincent Duseigne, cette dernière
est effondrée au bout de 3,5 kilomètres (probablement suite à la
construction de l'autoroute E42) et est fortement noyée au bout de 300
mètres.