Le
mariage de Marie-Philippine Licot et de Ferdinand Puissant, le 16
septembre 1812, pose les premières bases de la plus grande entreprise
sidérurgique du bassin Carolorégien. Si le père de Marie-Philippine
Licot était un maître de forges réputé, la famille Puissant possédait
l'un des plus grands complexe industriel de l'Entre-Sambre-et-Meuse,
les implantations s'étendants de Gougnies à Ham sur Heure en passant
par Morialmé, Aiseau et Biesme la Colonoise. Ferdinand Puissant
souhaite moderniser l'usine familiale mais comme de nombreuses
industries sidérurgiques implantées en Europe continentale, celle-ci
fait face à la concurrence anglaise, pays qui possède, depuis le début
du 19ème siècle, des laminoirs ainsi que des Hauts-fourneaux à coke,
beaucoup plus rentables que les fourneaux à bois utilisés en Belgique à
cette époque.
Afin de subvenir aux besoins de sa société,
Puissant décide de vendre les forges de Ham sur Heure ainsi que celles
d'Aiseau, deux des implantations les plus éloignées de Biesme la
Colonoise, point central de son complexe industriel. Puissant investi
alors dans la location d'un haut fourneau à Morialmé et possède dès
lors sept établissements en activité. La concurrence britanique reste
malgré tout féroce et Puissant décide de se rendre en Angleterre afin
d'observer et d'étudier les procédés qui y sont utilisés. Peu avant son
départ, il entend parler de la présence de Thomas Bonehill dans la
région et fait donc appel à son expertise, le chargeant d'étudier la
modernisation de ses usines. La solution au problème est rapidement
trouvée, les usines de Puissant ne perdureront que si elles sont
déplacées près d'une voie d'eau ou d'une voie ferrée et à proximité des
gisements houillers. Charleroi est tout indiqué pour le développement
des sociétés sidérurgiques et, même si le chemin de fer n'est que peu
développé à l'époque, le canal Charleroi-Bruxelles est sur le point
d'être terminé pour la navigation des baquets. Ferdinand Puissant
envisage sérieusement le transfert de ses usines dans le bassin
Carolorégien mais il décède brutalement le 27 mars 1933, à l'âge de
49ans.
Sa veuve prend alors le relais et, en association avec
Bonehill, acquiert, en 1834, une prairie de deux hectares ainsi que
deux terrains de douze ares à Marchienne au Pont, à cheval entre la
Sambre et le canal qui vient d'ouvrir. À deux, ils fondent la société
Veuve F. Puissant d'Agimont et Thomas Bonehill mais
Marie-Philippine
Licot ne survit pas très longtemps à son mari et meurt à son tour en
mars 1837. Leurs deux fils, Edmond et Jules, prennent le relais et,
avec l'aide de Bonehill, ils constituent en février 1838 la Société
anonyme des laminoir, forge, fonderie et usines de la Providence,
ce
nom provenant du lieu-dit de Marchienne au Pont ou furent bâties les
usines.
Le complexe est alors composé d'un grand laminoir équipé
de deux machines motrices de soixante et quarante chevaux qui
actionnent un train à tôles, un train marchand avec fenderie, trois
cisailles, un marteau frontal cingleur, un train à ébaucher, un tour à
cylindres, un martinet frontal ainsi que onze fours à puddler, quatre
fours à réchauffer, un four à brames, un four à tôle ordinaire et un
four à décaper pour la fabrication du fer blanc. Thomas Bonehill
s'éteint le 3 août 1858 et sera inhumé dans le cimetière de Marchienne
au Pont. Il laisse derrière lui un immense patrimoine sidérurgique et
sera reconnu comme un des pères de la sidérurgie européenne.
Les
années suivantes, la société de la Providence se développe et
deviennent un complexe industriel de plus en plus influent. Reconnue
internationalement, elle ouvre des usines en France et en Ukraine et,
en 1893, elle fait construire la première aciérie du bassin
Carolorégien sur son site de Marchienne au Pont.
Durant la
première guerre mondiale, le complexe est presque entièrement démantelé
par les allemands et il ne sera rebâti qu'en 1922. La seconde guerre
mondiale épargne en grande partie les forges en en 1966, la Société
Générale de Belgique, alors majoritaire, décide de fusionner les forges
de la Providence avec Cockerill-Ougrée.
La section de Marchienne au
Pont fusionnera en 1979 avec les tréfileries de Marcinelle et Fontaine
l'Evêque et deviendra la Thy-Marcinelle et Providence. L'aciérie
cessera es activités en 1980 et la fermeture du laminoir interviendra
trois ans plus tard. Les installations seront par la suite détruites
mais une partie des forges fut sauvegardée et occupée par le musée de
l'industrie jusqu'à son déplacement sur le site du Bois du Cazier.
Les forges sont dorénavant occupées par l'asbl Rockerill et sont depuis
utilisées pour des expositions et des concerts.