Au
18ème siècle, la révolution industrielle bat son plein dans tout le
bassin borain et l'accroissement exponentiel de la population pousse
l'industrie agro-alimentaire à augmenter le rendement des cultures.
Hélas, les engrais naturels ne suffisent plus et ce n'est qu'à la fin
du siècle que la découverte du phosphate permet un accroissement
considérable de la production. À cette époque, bien que le phosphate
existe dans la nature, la meilleure alternative est le phosphate
minéral tiré d'os calcinés mais sa fabrication nécessite alors un lourd
traitement chimique permettant de transformer ces ossements en acide
phosphorique directement assimilable par les cultures. Cependant, la
découverte en 1858 d'un très vaste dépôt de phosphate de chaux dans les
profondeurs de Cuesmes entraîna la réalisation de nombreux sondages qui
se révélèrent concluants. Le phosphate est alors essentiellement
constituée de galets, de graviers et de sables, ces derniers étant
issus d'un enrichissement naturel par dissolution de gangues
carbonatées. Le minerai récolté à la fois souterrainement, en chambres
et piliers, et en carrières à ciel ouvert titre alors jusqu'à 30%
d'oxyde de phosphore (P2O5).
En 1874, un nouveau procédé de
séparation des grains de chaux et de phosphate est mis en oeuvre avec
succès. Utilisé dans un premier temps dans les exploitations de Ciply,
ce dernier sera utilisé quelques années plus tard dans les
exploitations de Cuesmes dont la zone de découverte, le plateau de la
Malogne, donna son nom à l'ensemble des exploitations de la zone : les carrières de la Malogne.
Sept exploitations principales sont alors en service :
- La Carrière
Rolland,
- La carrière
Carrière Heidet et Legrand,
- La carrière de la
Grande Malogne,
- La carrière de la
Petite Malogne,
- La carrière
Scouflaire et Cie,
- La carrière de la
S.A. pour l'Exploitation des Phosphates,
- La carrière
Mortiau.
En
outre, on retrouve à Cuesmes une bonne dizaine d'exploitations
secondaires dont certaines étaient le fruit de sociétés d'importance
comme Solvay ou encore Courtois et Van Roy, une carrière foudroyée
après trois ans d'exploitation et également reliée au réseau global de
la Malogne.
Au début du 20ème siècle, un important système de
pompage fut mis en place afin d'exploiter les carrières sous le niveau
de la nappe phréatique. Cependant, la rupture d'une digue en 1911 causa
une importante inondation qui mit fin à la majorité des exploitations.
Reprises de manière sporadiques après la première guerre mondiale, ces
dernières seront majoritairement abandonnées dès 1919. En 1920, une
grande partie des carrières ainsi que les usines de traitement furent
rachetées par la Société
Anonyme des Phosphates et Engrais Chimiques L. Bernard de Mesvin
qui entreprend le creusement d'une nouvelle exploitation souterraine au
nord du bois Heidet. L'entreprise n'eut malheureusement pas le succès
escompté et dans les années trente, l'intégralité du patrimoine de la
société passe aux mains de la Société Métallurgique de Couillet qui
souhaite utiliser les terrains pour l'exploitation de la Houille.
Cependant, les démarches n'aboutirent pas et les excavations sont alors
reconverties pour la culture des champignons avant d'être à nouveau
exploitées pour le phosphate dans les années vingt et trente.
Malheureusement, la production ne retrouva jamais son niveau antérieur
et l'arrivée sur le marché des engrais chimiques ainsi que de
phosphates provenant d'Afrique du Nord mit définitivement fin aux
exploitations de la Malogne.
Les champignonnières continuèrent
cependant à prospérer, plus particulièrement dans les anciens travaux
de la carrière Scouflaire et Cie qui ferma ses portes en 1962 et dont
l'exploitation en meules est toujours visible de nos jours, bien
qu'elle soit partiellement noyée. Aujourd'hui, l'ensemble des carrières
possède une superficie d'environ cent hectares dont près de la moitié
se trouve sous la nappe phréatique, ce qui fait de ce dernier le plus
vaste réseau souterrain de Belgique.