Le laboratoire de recherche souterrain de Meuse/Haute-Marne
La naissance du laboratoire de
recherche souterrain de Meuse/Haute-Marne s'inscrit dans le projet
Cigéo et dans le programme de recherches françaises sur la gestion des
déchets radioactifs de haute activité à vie Longue (HAVL).
Ces déchets sont catégorisés comme tel lorsque :
- Leur activité atteint au moins 1 TBq par gramme ( 1012becquerels
). - Une demi-vie supérieure
à 31 ans.
Les premières recherches françaises sur les stockages sont organisées
par le Commissariat de l'énergie atomique qui désigne l'Agence
nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) pour mener
des travaux de reconnaissances géologiques dans le but de trouver un
site susceptible d'abriter un laboratoire de recherche souterrain, ces
travaux étant évaluées par un comité d'orientation et de suivi
rassemblant treize membres de plusieurs nationalités. Suite à de
violentes oppositions au projet, ces recherches sont suspendues dans
les années 80, ce qui amènera à la loi Bataille, un arrêté qui organise
les recherches sur la gestion des déchets radioactifs en trois axes
majeurs :
- La
séparation et la transmutation, - Le
stockage géologique, - L'entreposage
de longue durée.
L'Andra se voit donc confier un rôle de médiateur ainsi que la
responsabilité de concevoir, d'implanter et de réaliser les futurs
centres de stockage compte tenu des perspectives à long terme de
production et de gestion des déchets ainsi que d'effectuer toutes
études nécessaires à cette fin, notamment la réalisation de
laboratoires destinés à la recherche en couches géologiques profondes.
La prospection d'un lieu d'établissement amène l'Andra à envisager
l'enfouissement dans deux formations géologiques distinctes, le granite
et l'argile, deux types de sédiments stables et propices à
l'enfouissement. Un appel à candidature est alors lancé dans les
régions et à la fin de l'année 1993, de nombreux départements posent
leur candidature dont la Haute-Marne et la Meuse. La
concertation est alors menée par Christian Bataille et se termine le 21
décembre 1993 par la remise d'un rapport au gouvernement.
Trois sites sont retenus :
- Bure,
un site argileux situé entre la Haute-Marne et la Meuse,
- Marcoule,
site argileux situé dans le Gard,
- La Chapelle-Bâton,
un site granitique situé dans la Vienne.
Les résultats des enquêtes publiques menées sur les trois sites entre
mars et mai 1997 sont publiés en décembre de la même année dans un
rapport de la Direction de Sûreté des Installations Nucléaires au
ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement et au
secrétariat d'État à l’industrie. Le site de Bure est finalement retenu
lors du comité interministériel du 9 décembre 1998 malgré de très
importantes contestations.
C'est en janvier 2000 que la construction du laboratoire commence avec
l'aménagement du terrain ainsi que la construction des bâtiments de
surface. Quelques mois plus tard, le fonçage des deux puits débute mais
le manque d'expérience français en matière d'extraction minière, causé
par l'arrêt des mines de charbon et de fer, entraîne un accident mortel
qui conduira à la mise sous cocon des chantiers pendant près d'un an.
L'Andra décide alors de revoir la conception des méthodes de travail et
fait appel à un expert minier sud-africain en 2002. La reprise des
travaux intervient en avril 2003 mais l'immobilisation causée par cet
incident entraîne un retard considérable dans le planning des
expérimentations, ce qui amène l'Andra à expérimenter ses techniques de
soutènement dans un autre laboratoire de recherche, celui de Mol en
Belgique.
Les résultats de ces tests, portés sur un soutènement en arceaux doublé
de ciment projeté, est extrêmement concluant et dès novembre 2004, la
première galerie de recherche de Bure est construite à 445 mètres de
profondeur.
Les expériences scientifiques débutent en 2005 sur base de forages dans
l'argile du Callovo-Oxfordien, une couche sédimentaire âgée de 160
millions d'années. Ces forages servirent à l'étude sur la circulation
d'isotopes radioactifs dans le sol ainsi que sur la rétention chimique
de celui-ci. Les résultats de ces expériences étant collectés par
environ 1.400 capteurs reliés à un système d'acquisition, permettant
ainsi de suivre à distance les données. Par la suite, le fonçage des
puits continue et en décembre 2005, une liaison est établie entre les
deux puits dans la seconde galerie de recherche, située à 500 mètres de
profondeur. En avril 2006, alors que l'extension du laboratoire de
poursuit, les chevalements utilisés pour le fonçage sont démontés et
sont remplacés par les installations actuelles, deux tours équipées
chacune de trois machines d'extraction. En 2009, l'Andra publie un
rapport concernant une zone de 30km² jouxtant le laboratoire pour y
poursuivre l'étude d'un centre de stockage souterrain. Ce rapport est
approuvé par le gouvernement français en 2010 à condition que le
stockage des matières radioactives soit réversible. Il est donc prévu
que, dès 2030, les déchets de moyenne activité à vie longue seront
stockés sur ce site après avoir été traités et vitrifiés. Pour se faire
l'Andra prévoit de construire, vers 2025, un grand centre
divisé
en deux parties :
- La zone
descenderie :
elle se composera d'un terminal ferroviaire servant à réceptionner les
convois de déchets radioactifs, d'un bâtiment dédié à la
réception et au contrôle des colis ainsi que des ateliers et des
bureaux. Elle sera reliée au fond par une double descenderie permettant
le transfert des colis par funiculaire.
- La zone puits :
elle se composera des bâtiments liés au chantier, à l'exploitation et à
la maintenance des installations souterraines ainsi que des
puits
d'accès au fond.
Les déchets
radioactifs de haute activité à vie Longue devront quant à eux attendre
l'horizon 2060 car l'argile ne peut accueillir de déchets dégageant
une température supérieure à 90°C, soit environ 70 ans après leur
traitement. La fin du stockage est théoriquement prévue pour
2150. Après cette date, les installations seront démontée et les
galeries d'enfouissement seront scellées et isolées du reste du monde
pendant une durée estimée à plusieurs centaines de milliers d'années.